L’un des éléments les plus extraordinaires de l’église est son gigantesque porche voûté d’une travée d’ogives abritant l’entrée antérieure de l’édifice. Deux piles cylindriques d’échelle colossale (environ 4,30 mètres de diamètre) supportent cette voûte qui s’élève à 25 mètres au-dessus du sol. On ne connait pas d’autre exemple, à cette époque, d’une telle structure. 

Dans ses Notes d’un voyage dans le Midi de la France, Prosper Mérimée exprimait déjà son incompréhension face à cette architecture lors de son passage à Montpellier en novembre 1834 :

« Deux énormes piliers, ou plutôt deux tours massives, extrêmement élevées, soutiennent d’un côté une voûte ogivale surbaissée, qui s’appuie de l’autre sur le haut du mur de façade. Il est impossible de rien voir de plus lourd et de moins gracieux. Cependant la grandeur des proportions produit toujours, en architecture, un certain effet. L’usage d’un porche doit être de mettre à l’abri du soleil et de la pluie ; la hauteur des arcades de celui-ci le rend tout à fait inutile sous ces deux rapports. »

Porche de la cathédrale Saint-Pierre (avant restauration)

2011

© Thierry Dubessy. DRAC Occitanie

De 2011 à 2013, le porche d’entrée, aussi appelé « baldaquin », a fait l’objet d’une restauration majeure. L’opération a concerné la restauration des parements des deux piles mais également la voûte formant le baldaquin. Une masse d’informations historiques a été collectée pour arrêter le parti de restauration le plus respectueux de la conservation de l’ouvrage et pour assurer la sécurité du public sans dénaturer le monument.

De nombreux thèmes ont été abordés sur ce chantier passionnant. Le matériau utilisé au XIVe siècle pour la construction de l’église est un calcaire coquillier de grande qualité, probablement issu des anciennes carrières de Saint-Jean-de-Vedas, Pignan et Cournonsec. Au fil du temps, ces pierres ont subi une très forte altération sous forme d’alvéolisation.

Pilier du baldaquin, état de pierres partiellement dégradées par alvéolisation

© Thierry Dubessy. DRAC Occitanie

Comment limiter ces altérations ? Faut-il remplacer les blocs abimés ou bien peut-on conserver les éléments en complétant les vides par une maçonnerie ? Si oui, quelle composition donner à cette maçonnerie ? En cas de remplacement de pierre, quelle pierre de substitution proposer ? Ce sont autant de questions que soulève la restauration. 

Le nettoyage des pierres noircies par la pollution interroge également. Quel protocole choisir pour ne pas altérer l’épiderme protecteur de la pierre ? Des tests ont été réalisés et la solution du micro-gommage à sec a été retenue pour déposer les croutes de sulfate dues à la pollution. Cette technique consiste à projeter à basse pression de l’air mélangé à un abrasif très fin permettant de nettoyer la pierre de ses salissures tout en la respectant.

 

Un ouvrage énigmatique 


L'ensemble de l'ouvrage interroge. Certaines parties de ce porche étrange semblent ajoutées, des restes de pierre en façade supposent des constructions disparues. La lecture de l'édifice est loin d’être évidente et le chantier de restauration du baldaquin a permis de mieux comprendre l’évolution de l’église au cours des siècles.

Les troubles des guerres de Religion entre le milieu du XVIe siècle et le début du XVIIe siècle ont laissé la cathédrale mutilée. En 1567, la tour Saint-Benoît s’effondre, emportant avec elle les deux premières travées de la nef. La chute du clocher détruit également une partie de la voûte du porche, la porte méridionale et la grande rose carrée de la façade d’entrée.

Reliquat du jambage d'encadrement de la rose carrée de la façade primitive

© L. di Cesare. DRAC Occitanie

Aujourd’hui, en regardant sous la voûte du porche, on peut observer filant à la verticale le segment d’un grand cadre carré, reliquat de la façade primitive de l’église dans lequel s’inscrivait une rosace qui donnait jour à la nef d’Urbain V. Au moment de la restauration de la cathédrale en 1634, une petite rose ronde, toujours visible, a remplacé la rose carrée d’origine.

Achevée en 2013, la restauration du baldaquin a permis d’étoffer les connaissances sur la cathédrale montpelliéraine. Les travaux ont rendu son lustre au monumental porche d’entrée tout en assurant sa conservation pour de nombreuses années encore.

Porche de la cathédrale Saint-Pierre (après restauration)

2013

© M. Hequet. DRAC Occitanie

Commandé par la Conservation régionale des monuments historiques, le film documentaire ci-dessous invite à suivre la progression de ce chantier de restauration passionnant.